Terra Foundation, Giverny - Open studio, août 2006 : (...) Pour des raisons liées aux spécificités architecturales de mon atelier j’ai dû commencer à réfléchir à autre chose car la pièce était difficilement réalisable ici…et donc petit à petit l’idée de profiter du temps de la résidence pour pourvoir essayer autre chose s’est imposée. Je suis donc partie acheter de la brique. J’ai choisi un modèle de brique platiêre (qui sert à monter des cloisons et à isoler les maisons) pour sa qualité de volume - presque - plat mais assez large et long pour la faire ressembler au format d’une feuille de papier. Je l’ai aussi choisi pour avoir la possibilité de travailler avec un module de base que je pourrais placer, déplacer aisément et aussi choisir d’utiliser seul ou en grand nombre.  J’ai acheté aussi des morceaux de bois teintés en jaune car protégés contre les insectes, et de la peinture…Mon atelier est devenu au fil des jours une sorte de petit laboratoire de couleurs, volumes, dialogues entre objets et lieux, tentatives construites et volontaires ou accidents, essais altruistes sans contraintes ni regards extérieurs. De ces gestes posés et accumulés a commencé à fleurir un véritable répertoire de formes, une nouvelle écriture. Sous-jacente sans doute depuis bien longtemps. Mon nuancier s’enrichissant lui de nouvelles couleurs jour après jour….

J’avais déjà travaillé plusieurs fois avec de la brique (possibilité de construction, déconstruction, déplacement, autonomie, matériaux de construction, fragilité, solidité, terre,….) mais en décidant pour la première d’en peindre une j’ai fait basculer mon travail dans tout autre chose. Chaque jour m’a montré un nombre de possibilités de dérouler ce travail à l’infini : composition architecturale avec codes et futur système d’équivalence à créer peut-être (une brique = une dimension, une couleur = une végétation, une brique = une localisation…). Possibilité de toute sorte car tout ce qu’il y a après je ne le sais pas encore. Je dois continuer mon travail mais j’ai l’intuition de grand espace, d’architecture en dialogue avec ces petites briques peintes, de travail in situ, de dessins, de maquettes, de photos, de peintures au sol ou aux murs…

Ce que je montre aujourd’hui c’est le moment où j’en suis et donc juste une étape. Une composition picturale à l’échelle de mon atelier. Une peinture en volume aux accents de mini architecture avec ici et là des petites histoires, des petits dialogues, des combinaisons de couleurs, des tensions ou au contraire des harmonies, des passages…Une expérience que j’ai essayé de porter jusqu’au bout sans qu’elle ai valeur d’œuvre, de fin en soi, de sculpture prête à être exposée….Nul doute cependant que ce qui vient de se révéler à Giverny est un geste fondateur pour mon travail et pour les années à venir dont je ne saisis pas encore les tous les contours...
 

Isabelle Ferreira